Réflexions sur la crise –bis
Constatant – j’allais dire « contre toute attente » ce qui serait exagéré- que mon article du mois dernier (La crise...) n’était pas trop « à côté de la plaque », je continue à me risquer au prévisionnisme « free style » !
Deux sujets d’inquiétude me semblent trop largement ignorés ou passés sous silence :
1- La chine. L’opinion générale est que ce pays n’aura pas de problème grave : il est l’atelier du monde (s’il vend un peu moins aux Etats Unis il vendra un peu plus au reste du monde) ; il est le premier détenteur de bons du Trésor américain (donc il s’est acheté une double sécurité : les Etats Unis ne feront pas faillite / la Chine pourra continuer à se permettre une politique des droits de l’homme minimale et ne sera pas inquiétée par l’Occident dans ses objectifs commerciaux) ; une croissance un peu plus faible permettra de mieux réguler l’économie chinoise en surchauffe….
Je suis très septique. Il me semble au contraire que le consensus social et politique implicite en Chine c’est l’échange « liberté minimale » contre « croissance maximale ». En d’autres termes, le peuple accepte le joug à condition que plusieurs millions de Chinois en plus par an sortent de la pauvreté / aient accès aux biens de consommations. Or une croissance réelle à 3 ou 5 % brise ce consensus. On peut donc craindre une déstabilisation politique du pays, qui aurait évidemment des conséquences mondiales : qu’on le veuille ou non, nous sommes dépendants de la Chine pour notre consommation courante
2- Le « risque sur Etat ». En opposition totale avec la pensée dominante de ces dernières années, on voit revenir, toute aussi dominante, l’idée les Etats peuvent tout faire : garantir les crédits, sauver les banques, racheter des actifs pourris, injecter des liquidités de manière infinie dans l’économie, relancer les grands travaux ou la consommation… jusqu’à quand durera cette fiction ?
Nous avons déjà sous les yeux l’exemple de l’Islande, peut être demain celui d’un pays Balte : les Etats aussi tombent en faillite. Les règles de l’économie s’appliquent aussi à eux, et leurs créanciers veulent parfois aussi récupérer leur argent ! Des Etats qui ont accumulés des dettes publiques ou privées à hauteur de 140 % du PIB sont ils réellement et durablement solvables ? ne risque-t-on pas des « défauts » en série d’Etats souverains, qui viendraient mettre à mal l’idée que les Etats peuvent tout ? En bref, ne fait on pas trop confiance aux puissances publiques ?
Quand on regarde le désordre dans lequel les politiques économiques sont décidées aujourd’hui, on ne peut qu’avoir peur. Quelques exemples : le secrétaire au Trésor Américain, M. Paulson, décide d’un grand plan de rachat d’actifs pourris…. Pour annoncer quelques jours plus tard que l’argent servira à la recapitalisation des banques ; en Europe la notion de relance est interprétée de manières diamétralement opposées par des gouvernements censés se coordonner : ainsi, pendant que le Président Sarkozy essaie de convaincre qu’il faut investir dans la recherche et les grands travaux, Gordon Brown annonce une baisse de la TVA (c'est-à-dire la relance par la consommation des ménages) et Berlin se fait tirer l’oreille pour accepter le principe d’un déséquilibre budgétaire. Or tout le monde s’accorde à dire que dans les circonstances actuelles, l’Europe (et subsidiairement l’Union monétaire) est notre meilleure protection et que seul un plan de relance européen a quelques chances de réussir….
Bref, une chose est sûre, la crise est là, pour longtemps, et sera sévère…. Et pour terminer sur une note locale, j’espère que le budget 2009 de Colombes en tiendra compte.